Mais il fut gracié... à titre posthume
L'informatique a le premier rôle dans notre monde actuel, dans tous les domaines, tant privés que professionnels. Et l'Intelligence Artificielle régit les prises de décisions impliquant un grand nombre de données, un nombre trop grand pour que l'esprit humain ait le temps de les analyser de mille manières différentes et efficaces. Il y a bien quelqu'un qui est à l'origine de ces concepts. Un premier homme qui a pensé qu'une machine pouvait être intelligente et pouvait apprendre, pouvait chercher et trouver des réponses mieux et plus vite que l'homme. Et cet homme-là a peut-être sauvé une part du monde en son temps grâce à cela. Cet homme s'appelait Alan Turing. Il avait réussi, grâce à sa machine et à ses préceptes, à déchiffrer les codes secrets des allemands pendant la seconde guerre mondiale. Cet homme, ayant travaillé en ligne directe avec Churchill, a été condamné pour homosexualité. La suite est un drame. Il est décédé en 1954. Il a été gracié à titre posthume par la reine Elisabeth II en 2013.
Les romans, le films et les spectacles vivants se penchent souvent sur la question de la différence. La différence est une chose lourde à porter dans la société. Mais la différence crée aussi des génies. Alan Turing était de l'ordre du génie. Et Benoit Solès qui a écrit cette pièce et qui tient le rôle du mathématicien sur scène offre une très belle interprétation de ce sujet. Le personnage est si génial, si brillamment hors du commun qu'il en vient à paraître simplet. Quand on est très intelligent on est souvent un peu bête, n'est-ce pas ?! Celui qui déchiffre les équations mathématiques les plus pénibles ne sait pas toujours déchiffrer les cœurs des hommes. Les autres ingrédients de la pièce venaient se joindre au texte et au jeu des acteurs pour souligner l'évidence. Le décor de la pièce traçait les lignes d'un esprit fin. La vidéo et les images projetées venaient nous emporter dans un ailleurs, donner de la profondeur et de la magie à la scène. Bien des confrontations entre les acteurs, séparés souvent par une table, venaient concourir à l'opposition du sens et de l'insensé, du compréhensible et de l'incompréhensible.
On rentre donc, le temps de la pièce, dans une histoire poignante. On s'éprend d'un personnage attachant et intriguant. Mais cette pièce pose des questions, bien plus de questions que celle du drame d'Alan Turing. Elle s'interroge sur l'humanité. Sur les dérives de l'homme. Je ne vous donnerai qu'un exemple des questions que la pièce a soulevé dans mon esprit. Dans la pièce, Turing crée sa machine, l'ancêtre de l'ordinateur, pour redonner vie en quelque sorte à un ami d'enfance, au seul ami qu'il n'ait jamais eu, un garçon qui était plus brillant que lui. Son plus profond désir aurai été de retrouver l'ami perdu, de dialoguer avec. Alors après avoir vu la pièce j'ai pensé à Zuckerberg, concepteur du réseau social facebook, qui, on le sait bien, est un être asocial. Son rêve au départ avait été de trouver des amis... Le serpent se mord la queue me suis-je dit. Et l'Homme est responsable, pour grande part, indéniablement.
Voilà. La pièce est programmée jusqu'au 27 avril 2019 au Théâtre Michel à Paris.
Vous pouvez cliquer ici pour vous rendre sur la page internet du Théâtre Michel qui y est consacrée.
Toutes les photos qui se trouvent sur cette page sont de © Fabienne Rapeneau.
Cet article a été conçu et rédigé par Yassi Nasseri, fondatrice de Kimamori.