État du Mississippi, sud-est des États-Unis. À la brigade criminelle de la petite ville de Pascagoula, un enquêteur s'est fait connaître pour sa passion, la résolution de cold case.
Pour Darren Versiga, ces vieilles affaires non-élucidées ne sont pas seulement d'insurmontables défis qui titillent la fierté de ce champion de tir, ce sont avant tout des personnes, de vraies personnes qui méritent de retrouver leurs identités ou de voir leurs assassins enfin condamnés. C'est une question de respect pour la vie humaine.
En 2010, le lieutenant (survivant de l'ouragan Katrina et ancien boxeur !), se plonge dans une affaire qui sera celle de toute une vie ; parvenir à résoudre le meurtre d'une femme noire, survenue dans les années 70. Problème, son identité n'a jamais été découverte ...
Dans cette histoire où tout est vrai, Versiga va se retrouver confronté au tueur en série le plus prolifique des États-Unis.
La vie du lieutenant Versiga, ses mésaventures comme ses réussites, sont autant passionnantes que la quête de la vérité dans laquelle nous sommes plongés pour parvenir à mettre un nom sur les ossements de cette femme et pour réussir à stopper le road-trip macabre de son assassin.
La fascination de l'auteur (et journaliste) pour ce personnage atypique et attachant, qu'il a rencontré lors d'un reportage aux États-Unis, transparait à chaque page. Raphaël Malkin décrit avec beaucoup d'humour et de tendresse la vie de Darren Versiga, sans tomber dans le pathos. Cet homme au grand cœur s'était d'ailleurs lancé dans une autre mission avec son épouse : la création d'une association pour acheter et livrer des pierres tombales sur des sépultures qui en étaient dépourvues (par faute de moyen, ou dû à la disparition de membres de la famille, anonymisant les défunts).
« Au cours de centaines d'heures d'entretiens étalées sur plusieurs mois, Samuel Little confessa devant la caméra et le magnétophone du ranger James Holland exactement 93 meurtres perpétrés entre 1970 et 2005. C'était sans précédent ».
Loin du cliché que l'on peut avoir habituellement sur la police américaine, Versiga ne supporte pas le manque de considération que nombre de ses collègues ont pour les affaires touchant la population noire, ou celles ciblant les prostituées. Pour lui, personne ne peut être privé de justice et de respect, y compris ceux que " la société avait déjà enterrés".
Grâce aux nouveaux moyens technologiques dont il dispose depuis les débuts de l'enquête sur Jane Doe - comme est appelée chaque victime féminine sans identité - notamment avec l'analyse ADN, il rouvre cette enquête vieille de 40 ans sans savoir qu'il va permettre de mettre la main sur Samuel Little, un tueur de femmes au bilan meurtrier glaçant. Car oui, comme vous l'avez compris, pas de suspens et de mystère autour de l'enquête. Nous sommes dans un true crime, notre histoire est véridique et déjà jugée. Mais rassurez-vous, on ne s'ennuie pas pour autant, loin de là.
L'enquête durera des années, sans que Darren Versiga ne s'en détache ou même ne l'oublie. Samuel Little a été reconnu coupable de plus de 60 meurtres sur les 93 qu'il avait avoués malgré sa mémoire souvent hésitante. Sa rencontre avec Versiga est d'ailleurs très intéressante car, même si bien évidemment tout les oppose, elle nous laisse entrevoir la difficulté inhérente à ce métier, qui vous fait - littéralement - regarder le Mal dans les yeux et lui parler amicalement pour qu'il vous donne toutes les informations dont vous avez besoin. Darren Versiga, comme beaucoup d'autres, accepte cette charge immense afin d'en soulager les autres, un peu. Et rendre justice aux morts, toujours.
« À sa manière, Darren Versiga est à lui tout seul ce que l’Amérique des plaines est tout entière : un peu bas du front et généreux. ».
Le monde semble avoir besoin de plus de flics comme Darren Versiga, quand des Samuel Little et autres Ted Bundy rodent. Celui qui s'est passionné pour le travail du bois (dont vous pouvez d'ailleurs admirer les œuvres sur FaceBook), semble toujours rester humble, chassant de la mains les compliments pour repartir tête baissée dans une affaire qui mérite toute son attention.
Comme le disait si bien Voltaire : "On doit des égards aux vivants ; on ne doit aux morts que la vérité".
La photographie en tête de l'article est d'© Amalia Luciani pour Kimamori.
Article d'Amalia Luciani
Historienne de formation, elle est enseignante, photographe et nouvelliste. Elle a été journaliste en freelance.
Responsable de la rubrique Littérature de l'Imaginaire, elle gère le compte et les communications Instagram. Elle est également l'experte polar de Kimamori.