Nature bannie

la clé de l'abîmeLivre fantastique par excellence, « La clé de l’abîme » dépasse malgré tout les frontières du genre. En effet, José Carlos Somoza, quand bien même passionné de science fiction aime à explorer des thèmes philosophico-spirituels (et parfois scientifiques, comme ce fut le cas par exemple dans son livre « La Théorie des Cordes » que j’avais adoré). L’auteur, espagnol, est psychiatre de métier. Avec ce livre-ci, très futuriste, il nous propulse dans un monde où il ne reste plus rien de la nature telle que nous la connaissons, qu’il s’agisse des éléments de la nature et des paysages ou des êtres humains eux-mêmes. Ce futur-là est peuplé d’êtres conçus en laboratoire, parfois d’une conception biologique au départ, mais la plupart du temps correspondant à « la commande » des futurs parents. Hommes et femmes désormais se ressemblent étrangement, puisque aucun des deux ne « donne naissance », peut-être… Une seule langue est connue et parlée par tous et une seule Bible existe. Les hommes auront néanmoins à choisir le chapitre du Livre qu’ils étudieront plus avant dans le cadre de leur croyance. Et cette Bible n’est autre qu’un écrit de Lovecraft. Les croyants (qui auront approfondi leur connaissance d’un ou deux chapitres du Livre) sont dotés de pouvoirs surnaturels (en prenant comme référence ce qui nous est naturel !)…

Il est un passage où les personnages se trouvent dans une région non civilisée, et le contact avec la « nature non conçue » les remplit d’effroi. Le livre interroge le sens de la croyance et de la foi, de la clairvoyance aussi. J’ai aimé, tout comme dans le chant du monde de Gide, le personnage de cette femme aveugle, qui en réalité « voit » mieux que tous les autres personnages…

L’intrigue elle-même tourne autour de la quête de cette clé qui mène au Créateur. Plusieurs groupes se constituent pour s’en emparer. Le thriller est fort d’un suspens qui nous tient en haleine jusque la dernière page.

LA CLÉ DE L’ABÎME
José Carlos Somoza
Éd. Actes Sud , 2009 (v.o. 2007)
Traduit de l’espagnol par Marianne Millon
Prix Ciudad de Torrevieja 2007

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